Le floating est une technique spécifique de bluff qui requiert de la maîtrise, une bonne lecture de ses adversaires et des conditions spécifiques qu’il faut impérativement remplir. Décryptage.
Article par Raquel Azran
LivePoker n°14 Juin 2008
le lien : http://www.livepoker.fr/article-Le-floa ... tique.html
Qu’est-ce que le floating ?
Le floating est une technique de bluff très avancée, qui consiste à suivre une enchère au flop sans aucun jeu pour bluffer le coup au turn, en misant si votre adversaire checke, en le sur-relançant s’il mise. Ce bluff, qui s’étend donc sur deux tours d’enchères – le flop et le turn – est d’autant plus crédible et puissant que le fait de caller sec au flop ne peut être qu’effrayant pour votre adversaire. En effet, votre call au flop peut facilement laisser craindre un slowplay avec un jeu monstre. Particulièrement efficace pour contrer les continuation bet, le floating est une arme redoutable pour profiter d’une faiblesse affichée de votre adversaire pour gagner le coup arrêté au turn.
Quelles sont les bonnes conditions pour le tenter ?
La première, évidente au regard de la définition même du floating, est d’avoir la position sur votre adversaire. Vous devez impérativement être placé après lui dans le tour de parole pour tenter un floating.
La seconde est d’être en heads up avec son adversaire. De façon générale, il faut privilégier le tête-à-tête pour bluffer, mais être dans cette situation est ici, dans le cas de ce bluff plutôt sophistiqué, déterminant. C’est aussi pourquoi il faut avoir la position sur son adversaire et même être dans les derniers à parler pour s’assurer qu’aucun joueur n’a suivi la mise de votre cible. Si c’est le cas, votre plan tombe à l’eau.
Comme toujours, il faut connaître son adversaire, savoir si le continuation bet fait partie de son arsenal, et si c’est un joueur qui n’est pas suffisamment médiocre pour ne pas comprendre que, par votre move, vous représentez une main forte – du moins c'est ce que vous voudriez qu’il pense ! Ce qui exclut naturellement de tenter un floating contre des joueurs très faibles ou des calling stations qui vous suivraient jusqu’au bout avec la deuxième ou troisième paire du board…
Et si vous êtes vraiment courageux… ou alors absolument sûr de votre lecture !
Si votre adversaire n’a pas l’air plus impressionné que cela par votre call au flop et qu’il mise encore au turn… gare ! Ou il a vraiment du jeu, ou il a compris votre manège et vous prouve qu’il ne se laisse pas si facilement faire. Si vous connaissez bien votre client et que vous êtes absolument sûr de votre lecture, sur-relancez-le de façon substantielle… et priez pour que ça marche ! Vous pouvez même imaginer faire ce move en sachant que votre adversaire a trouvé du jeu, mais un jeu pas assez fort pour qu’il assume une sur-relance musclée. Dans les deux cas, il vous faudra du courage, du feeling et une lecture sans faille ! Ce qui suppose évidemment de ne tenter ce floating extrême qu’avec beaucoup de parcimonie.
De façon générale, le floating est une technique assez complexe, un bluff « amélioré » qui impose que de nombreuses conditions soient réunies pour être réussi. N’en abusez pas !
Deux exemples de floating réussi
Voici deux coups tirés d’un cash game, où la situation est particulièrement propice au floating. La table compte neuf joueurs, les blindes sont de 5€/10€, et le tapis moyen d’environ 1000 €.
1. Un joueur assez sérieux relance en middle position à 35 €. Vous êtes au cut-off et découvrez AtDc. Vous suivez, et tout le monde passe.
Flop : 3t 10c 2p
Flop rainbow et totalement anodin. La grosse blinde checke, le relanceur initial attaque à 65 € dans un pot de 110 €. Une relance quelque peu timorée et, à moins qu’il ait relancé avec une paire en main, il est peu probable que ce flop ait amélioré sa main. Tout porte donc à croire qu’il effectue un continuation bet classique avec le range de mains suivantes AR, AD, AVs, RDs, ou une moyenne/petite paire… Vous échafaudez donc votre plan basé sur le floating, et callez sa mise. Le pot s’élève maintenant à 240 €.
Turn : 8k
Turn tout aussi inoffensif et, sans grande surprise, votre adversaire checke. Il vous suffit alors de miser à hauteur de la moitié du pot environ (120 à 150 €) pour convaincre votre adversaire qu’il est battu et le voir jeter sa main… avec la satisfaction du devoir bien accompli.
2. Tous les joueurs passent jusqu’au hi-jack, un joueur créatif et intelligent, qui relance à 30 €. Vous payez au bouton avec 10cVc. La grosse blinde, un joueur très loose, calle également.
Flop : RkRp9c
La grosse blinde checke, le hi-jack mise agressivement à hauteur du pot, soit 100 €. Vous ne le mettez pas sur un Roi, car même si c’est un joueur qui attaque régulièrement les coups qu’il relance, qui varie son jeu et ses mises, pourquoi une enchère si élevée sur un flop rainbow s’il a effectivement brelan ? Quant à la grosse blinde, il paraît d’ores et déjà se désintéresser. Encore une fois, l’idée du floating vous vient à l’esprit. Vous suivez donc les 100 €. La BB jette. Le pot est maintenant de 295 €.
Turn :4t
Le hi-jack poursuit sur sa lancée et mise 180 €. Fidèle à votre première analyse, et convaincu de votre lecture, vous le sur-relancez à 420 €. Votre adversaire vous regarde, admire votre move et même s’il est lui aussi persuadé que vous n’avez pas de Roi, il ne peut pas suivre.
